Knock ou le triomphe de la médecine, de Jules Romain.

« Pour ceux que notre première conférence aurait laissé froids, j’en tiens une autre, dont le titre n’a l’air de rien : “Les porteurs de germes”. Il est démontré, clair comme le jour, à l’aide de cas observés, qu’on peut se promener avec une figure ronde, une langue rose, un excellent appétit, et receler dans tous les replis de son corps des trillions de bacilles de la dernière virulence capables d’infecter un département ».

À la fois comédien, décorateur et metteur en scène, Louis Jouvet présenta cette pièce pour la première fois à la Comédie des Champs-Elysées le 15 décembre 1923. Cruelle actualité de ces propos, Éric Naulleau et moi aurions dû entendre des extraits de cette œuvre, ainsi que d’autres textes de Jean Cau, Philippe Lançon, etc., lors d’une représentation de « Conversations autour de portraits et autoportraits » de Fabrice Luchini au théâtre des Bouffes Parisiens. Ce deuxième confinement en a décidé autrement, nos billets ont été automatiquement reportés en février prochain. Reprogrammée à partir de décembre 2020, sa pièce devrait être jouée au moins jusqu’en mars 2021.  Courez-y, Fabrice Luchini nous parle d’une époque sans réseaux sociaux, d’une époque où la littérature avait encore de la valeur, d’une époque où les politiques pouvaient encore sauver une nation… 

Devant cette pandémie mondiale, beaucoup de médecins de l’hexagone ont révélé l’incroyable impréparation de notre système de soins. Dans le même temps, certains d’entre-eux, pas tous, sont devenus des pantins médiatiques de la pire espèce. Nous sommes au milieu d’une catastrophe annoncée ; autour de cette pandémie, rien n’est clair aujourd’hui. Où sont passées les études scientifiques que nos tutelles universitaires se devaient d’entreprendre ? 

Comme le souligne Fabrice Luchini, la prévision du docteur Knock reste encore d’une grande pertinence aujourd’hui : « Votre objection me fait penser à ces fameux économistes qui prétendaient qu’une grande guerre moderne ne pourrait pas durer plus de six semaines. La vérité, c’est que nous manquons tous d’audace, que personne, pas même moi, n’osera aller jusqu’au bout et mettre toute une population au lit, pour voir, pour voir ! Mais soit ! Je vous accorderai qu’il faut des gens bien portants, ne serait-ce que pour soigner les autres, ou former à l’arrière des malades en activité, une espèce de réserve ».

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